Dans les églises des premiers siècles, le sanctuaire était séparé de la nef par une barrière ou un voile. Barrières plus ou moins hautes, de métal, de bois ou de pierre, elles existaient tant en Orient qu’en Occident.
Lien évident entre le culte chrétien et la tradition liturgique juive, le temple chrétien est le prolongement du temple vétéro-testamentaire.
Il s’agit de délimiter l’espace sacré où se manifeste « le second avènement » : le béma.
Limite entre deux mondes : hors du temps et dans le temps.
Quelques barrières ornées de représentations du Christ et de la Théotokos existent avant la période iconoclaste, mais c’est après celle-ci (VIIIème siècle) que l’iconostase s’élabore vraiment et se développe (les barrières byzantines ne contenaient pas plus de deux ou trois rangées d’icônes).
Après le XIVème siècle, en Russie, il y a plusieurs rangées d’icônes et Théophane le Grec et Roublev vont, les premiers, représenter la « déisis » en pied et non plus en buste (environ 2m de hauteur) dans la cathédrale de l’Annonciation à Moscou ; puis le même Roublev et son ami Daniel « le noir » peignent une déisis de 3m de hauteur pour la cathédrale de la Dormition à Vladimir (et une rangée de prophètes).
C’est au XVIème siècle que vient s’ajouter la rangée des patriarches.
Après le XVIIème, on voit même des iconostases à sept étages ! (rangée de chérubins, séraphins au-dessus des patriarches).
Il faut savoir qu’une église orthodoxe avec tout ce qui fait partie de son aménagement liturgique représente l’univers, mais l’univers sauvé, image de l’unité cosmique retrouvée, avec, à sa tête, son chef : le Christ dans la coupole (« le pantocrator ») La coupole représente le ciel et la nef la terre.
Le manuel iconographique grec recommande d’inscrire autour du Christ Pantocrator :
« Voyez, voyez c’est Moi qui Suis et il n’y a point d’autre Dieu que moi » (Deut 32,39),
ou : « C’est Moi qui ai fait la terre et qui sur elle a créé l’homme, c’est Moi qui de ma main a établi les cieux » (Is 45,22).
Si la décoration murale n’est pas fixée et inchangeable, celle de l’iconostase l’est.
(Sur cette iconostase de l’église de la Transfiguration (île Kiji, en Russie) on distingue tout en haut la rangée des patriarches avecl’icône de la Vierge du signe au centre, puis la « déisis » avec le Christ en Gloire, la rangée des icônes des fêtes et tout en bas larangée « locale » dont l’icône de la Transfiguration puisque l’église lui est consacrée).
Période avant la Loi : | Rangée des patriarches, d’Adam à Moïse, qui portent des phylactères avec les textes appropriés avec, au milieu, la Trinité, (apparition du Dieu, un et trine, à Abraham), Adam, Noé, Melchisédec, Abraham, Isaac, Jacob, Juda, Jessé, David, Salomon, Manassé, Moïse |
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Période sous la Loi : | Rangée des prophètes, de Moïse au Christ avec les textes de leurs prophéties sur l’Incarnation avec, au milieu, la Vierge du Signe (Is 7,14) Isaïe, Jérémie, Ezéchiel, Daniel, Osée, Joël, Jonas, Habaquc, Elie, Samuel, Natan, Zacharie |
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Période « de la grâce » : | Rangées des « fêtes » (fêtes christiques) : réalisation de ce qui a été annoncé dans les deux rangées supérieures, à savoir la venue du Christ, dans ses principales manifestations. A Byzance, cette dernière rangée était située sous celle de la Déisis pour décrocher plus facilement les icônes. En Russie elle est souvent au-dessus, en raison de la logique théologique. Les icônes des fêtes sont alignées suivant l’ordre de l’année liturgique. |
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La rangée de la DEISIS : | Elle représente la prière de l’Eglise pour le monde.
Il est à noter que les saints princes ou guerriers ne sont pas représentés ici avec leur armure (contrairement aux représentations murales), puisque la Déisis exprime l’ordre du « siècle à venir », c’est-à-dire du monde à venir, transcendé, spiritualisé. Les apôtres qui y sont représentés sont : Pierre, André, Jacques, Jean, Philippe, Barthélémy, Matthieu, Thomas, Jacques (fils d’Alphée), Thadée, Simon. Judas est remplacé par Paul (comme sur l’icône de la Pentecôte). |
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Enfin, vient la rangée locale : | Elle est l’objet d’une vénération particulière d’autant qu’elle est à la hauteur des visiteurs. En dehors de l’icône du Christ à droite et de la Théotokos à gauche, sont habituellement représentés les diacres Etienne et Barnabé (sur les portes latérales) et les saints locaux ou la fête éponyme de l’église. On y ajoute parfois Michel et Gabriel –quoiqu’ils soient représentés sur la Déisis. |
Les Portes Royales représentent l’entrée dans le Royaume dont l’Annonciation est le point de départ et les quatre évangélistes sont les annonciateurs, ce qui explique pourquoi ils y sont représentés.